Le cadre fiscal des crypto-monnaies en France distingue investisseurs occasionnels et professionnels, avec un niveau d’imposition distinct. Guide d’une déclaration de revenus conforme au droit avec l’avocate Stéphanie Némarq-Attias.
La saison 2022 de la déclaration de revenus est ouverte. Et avec une part croissante de Français investisseurs en cryptomonnaies comme Bitcoin (8% selon KPMG et l’Adan), cette édition pourrait comporter des obligations nouvelles pour certains de ces contribuables.
En effet, les actifs numériques (et non les cryptomonnaies spécifiquement) n’échappent pas à l’impôt pour les particuliers. Le cadre fiscal est récent cependant puisqu’il remonte à 2019 seulement. Et l’imposition de cette catégorie d’actifs comprend quelques spécificités.
Investisseur crypto à titre occasionnel ou professionnel
Connaître les dispositions fiscales en vigueur sur les crypto-actifs s’impose pour les contribuables résidents fiscaux en France afin de remplir leur déclaration en toute conformité et bonne foi. Rappelons que celle-ci s’applique donc aux revenus enregistrés en 2021.
Précisons en outre que le régime d’imposition des plus-values réalisées par les particuliers n’est pas unique. Tous les contribuables ne se rangent pas dans la même catégorie, signale Stéphanie Némarq-Attias, avocat counsel au sein du cabinet CMS Francis Lefebvre Avocats.
La première question à vous poser est : êtes-vous considéré comme un investisseur à titre occasionnel ou professionnel ? S’il faut se poser cette question, c’est parce que le régime fiscal, et donc déclaratif, est étroitement lié à cette qualification”, explique l’experte en droit fiscal à Coins.fr.
La première tâche consiste pour le contribuable à définir son statut. Or, y répondre n’est pas nécessairement une évidence. Le texte n’est en effet pas « extrêmement clair » sur ce point. Il faudra donc s’appuyer sur « un faisceau d’indices » pour arrêter cette qualification sur la base de la doctrine fiscale.
Ce faisceau d’indices se compose de critères tels que le nombre et la fréquence des opérations, leur nature et la technicité requise pour leur exécution, le délai écoulé entre les achats et cessions d’actifs numériques ou encore l’importance du portefeuille et du profit enregistré…
Les critères sont multiples et interviennent pour distinguer l’investisseur occasionnel du professionnel. Et mieux vaut ne pas se tromper sur ce point sous peine de s’exposer par la suite à des redressements fiscaux. Les enjeux en termes d’imposition sont en effet majeurs selon la qualification du contribuable. En cas d’incertitude, il est dès lors préférable d’engager une discussion préalable avec le Fisc.
Par ailleurs, le droit n’est pas figé en ce qui concerne ce point de la qualification, occasionnel ou professionnel, comme le déclare Stéphanie Némarq-Attias. Une loi votée en décembre 2021 s’efforce de clarifier la distinction entre les deux catégories. Pour cela, le Fisc se réfère aux opérations de bourse et à son régime fiscal. La législation précise les critères, réduisant en principe les risques d’erreur et de contrôle.
Ces critères se rapprochent de ceux associés au faisceau d’indices cité précédemment. Il s’agit par exemple de la maîtrise d’informations spécialisées, de l’utilisation d’une plateforme sophistiquée ou d’outils spéculatifs complexes.
Flat tax à 30% ou régime BIC
Sa qualification en tant qu’investisseur arrêtée, le contribuable dépend donc d’un régime et d’une taxation associés. Pour les opérations réalisées en 2021, un Français considéré comme un investisseur occasionnel voit sa plus-value soumise au prélèvement forfaitaire à 30%. Le contribuable n’aura en outre pas la possibilité d’opter pour le barème progressif de l’impôt sur le revenu.
A ce taux plancher de 30% peut par ailleurs s’ajouter une contribution additionnelle : la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus. Celle-ci peut atteindre jusqu’à 4%. Au maximum, la taxation de la plus-value pourra s’élever par conséquent à 34%. Le régime appliqué à un vendeur de crypto-actifs à titre occasionnel agissant dans le cadre de sa gestion de patrimoine est amplement plus favorable que celui auquel sont assujettis les professionnels.
Ces investisseurs experts sont taxés dans la catégorie des BIC (Bénéfices Industriels et Commerciaux). « Cela signifie que le montant de leurs gains apparaîtra dans cette catégorie sur leur déclaration d’impôts », détaille Stéphanie Némarq-Attias. « En fonction de la masse de vos revenus, la taxation, au global, peut atteindre jusqu’à 66,2% », ajoute-t-elle.
Ce taux s’applique aux revenus les plus élevés. Il intègre l’impôt sur le revenu à la tranche maximum de 45%, les prélèvements sociaux (17,2%) et la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus. 66,2% correspond donc au haut de la fourchette. Et le taux minimum ? Il est corrélé aux gains et n’est par conséquent pas unique.
Des évolutions à venir à compter du 1er janvier 2023 : le droit n’est pas figé. Des changements sont d’ores et déjà prévus pour la déclaration 2024, c’est-à-dire dès les opérations réalisées à partir du 1er janvier 2023. Alors, elles entreront dans la catégorie des BNC (Bénéfices Non Commerciaux) et plus des BIC en ce qui concerne les investisseurs professionnels.
Les investisseurs occasionnels sont concernés eux aussi par la réforme. Aujourd’hui, ils ne peuvent opter pour le barème. Dès 2023, ils en auront la possibilité. « C’est intéressant, à condition que vos revenus soient relativement faibles », indique l’avocate de CMS Francis Lefebvre Avocats.
Comment calculer ses impôts sur les crypto-monnaies ?
Pour définir son montant d’imposition, le contribuable français doit se livrer à des calculs, mais pas sur l’ensemble de ses opérations sur des crypto-actifs. L’échange d’un token contre une autre, de l’ether contre un stablecoin par exemple, n’est pas concerné par l’impôt. Pour l’investisseur occasionnel, le fait générateur de l’imposition, c’est en effet le transfert des cryptomonnaies en monnaie fiat, ou encore l’achat d’un bien ou service avec ces tokens.
« Il faut garder à l’esprit que c’est uniquement dans ces cas de figure que l’investisseur occasionnel a la nécessité de déclarer une plus-value », insiste Stéphanie Némarq-Attias. Charge alors au redevable de l’impôt de calculer sa plus-value. Et ces calculs peuvent s’avérer complexes en raison des multiples transactions qui peuvent intervenir au cours du cycle de détention d’une cryptomonnaie. Cette complexité est d’ailleurs à l’origine du développement de services de fiscalité dédiés. Ils visent à aider les particuliers dans leurs déclarations et le calcul de leurs plus-values.
Que ce soit avec l’aide d’un logiciel dédié ou non, le calcul est « essentiel » et figurera dans la déclaration d’impôts sur le formulaire 2086. Seront indiqués les calculs détaillés des plus et des moins-values. En cas de déclaration en ligne, les informations s’inscrivent automatiquement sur le 2042C.
Précisons que le formulaire 2086 mentionnera en outre la valeur globale du portefeuille au moment de la cession. Cette approche, qui distingue les portefeuilles de crypto-actifs des comptes bancaires à l’étranger, par exemple, est qualifiée « d’intrusive » par l’experte du droit interrogée par Coins.fr.
Il est impératif pour le contribuable de conserver ses justificatifs, par exemple en faisant des captures d’écran si vous craignez de ne pas retrouver les fichiers listant les transactions. Il ne suffit pas de faire ses calculs. Le délai de reprise de l’administration est de trois ans plus l’année en cours”, recommande-t-elle encore.
Dans le cadre de sa déclaration de revenus, le particulier est donc soumis à deux grandes obligations : la fourniture du calcul des plus ou moins-values et la déclaration des comptes d’actifs numériques à l’étranger. Pour chacun de ces comptes « ouverts, détenus, utilisés ou clos à l’étranger » doit être rempli l’imprimé 3916 BIS. Et attention de ne pas oublier de mentionner les comptes fermés sous peine de s’exposer à un redressement fiscal, témoigne Stéphanie Némarq-Attias.
Le statut particulier des moins-values
Seules les plus-values sur la revente de cryptomonnaies sont imposées. En ce qui concerne les moins-values, leur traitement comprend une spécificité notable. Celles-ci ne sont déductibles des plus-values d’un même exercice et à condition qu’elles soient de même nature. Impossible donc, par exemple, de déduire une moins-value sur actifs numériques d’une plus-value sur titre mobilier classique.
Enfin, à défaut sur l’exercice de plus-values sur actifs numériques, le contribuable perdra définitivement toute possibilité de déduction d’une moins-value. Le droit fiscal ne prévoit pas de report sur des plus-values de même nature ultérieures. En la matière, les moins-values sur actifs numériques bénéficient d’un traitement propre et défavorable par rapport à d’autres classes d’actifs. Et pour l’avocate conseil, rien ne justifie cette distinction au détriment des crypto-actifs.
Lorsque vous réalisez une moins-value, il est préférable néanmoins de la reporter sur l’imprimé 2086. On peut espérer qu’à l’avenir ces moins-values des années antérieures puissent être imputées. Rien ne suggère que ce le sera effectivement dans le futur cependant. Mais c’est un véritable axe d’amélioration du texte”, commente Stéphanie Némarq-Attias.
Une telle évolution passera nécessairement par l’adoption d’un texte de loi, avant une probable intégration à la doctrine de l’administration fiscale.
Le regard de Florian Wimmer, CEO de Blockpit
À l’heure actuelle, (presque) plus personne n’ignore que les plus-values en crypto sont soumises à l’impôt, comme pour tout autre instrument financier. Cependant, tout le monde ne sait pas comment s’y prendre. Le cadre juridique des crypto est encore récent. Des désaccords persistent même entre les experts fiscaux.
Pour s’affranchir de cette tâche et de l’incertitude qui l’accompagne, Blockpit, partenaire de Coins.fr, a créé une application de calcul de l’imposition des crypto-monnaies. L’entreprise propose trois solutions en un seul outil. Le portefeuille de crypto détenu est toujours accessible, comme les déclarations associées. Le calcul de l’impôt est optimisé et la déclaration est intégrée au formulaire d’impôt officiel, source de sécurité juridique. Ainsi, les investisseurs en crypto-monnaies peuvent soumettre eux-mêmes leur déclaration d’impôt et économiser sur les services d’un cabinet de conseil fiscal.
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