Exclusif – L’enseigne de prêt-à-porter IKKS déploie une stratégie pragmatique à l’égard du métaverse et des NFT. Outre un stand dans Decentraland, de nombreux projets sont à l’étude. Entretien avec Valérie Dassier, sa directrice générale adjointe.
« Les marques doivent nous utiliser pour faire du branding ». C’est la recommandation adressée par Sébastien Borget, le cofondateur de The Sandbox, l’un des principaux métavers.
Message parfaitement reçu par Valérie Dassier, directrice générale adjointe de l’enseigne de mode IKKS. Fondée en France dans les années 80, la marque possède des boutiques dans une quarantaine de pays, dont plus de 400 dans l’Hexagone. Et bientôt, elle disposera de son premier stand dans le métaverse.
Ancrer une image de marque innovante via le Web3
Du 24 au 27 mars, la fashion week se déclinera sur le métavers dans l’univers de Decentraland. Et IKKS y sera donc présent, aux côtés d’autres marques internationales, au travers d’un stand virtuel.
C’est ce que révèle Valérie Dassier à Coins.fr dans le cadre d’une interview. IKKS est allé vite. Un mois plus tôt, la directrice publiait sur LinkedIn un message devenu rapidement viral. Elle annonçait vouloir développer des compétences et projets autour du métavers et des NFT.
Cette publication faisait suite à 48 heures d’acculturation intensive à l’univers crypto et à ses usages, nous confie-t-elle. « J’ai suivi tout un parcours initiatique, jouant à Roblox, me connectant à Decentraland, créant mon Metamask… J’ai consacré du temps à comprendre cette marche technologique », précise-t-elle ainsi.
Pour Valérie Dassier, pas de doute, le Web3 constitue « un nouvel eldorado », comme l’avait été le Web2. « Pour un retailer, il constitue un nouveau terrain d’expression, avec une cible segmentée que je ne connais pas aujourd’hui. Même si cela reste expérimental, il est capital d’y aller dès à présent », déclare la DGA d’IKKS.
L’intérêt pour le metavers, et le Web3 plus largement, répond à deux enjeux principaux, justifie-t-elle. Il s’agit d’une part de contribuer à l’image d’acteur innovant de la marque de retail. D’autre part, il est nécessaire d’anticiper afin de « mûrir des business models intelligents » et d’être prêt lorsque le marché sera plus mature.
Des coups business pour financer les initiatives moyen terme
Cette stratégie, Valérie Dassier l’a déjà mise en œuvre par le passé avec le Web 2.0, avec à la clé des gains de parts de marché sur la concurrence. Pour répondre à ses deux objectifs, IKKS prévoit donc dans un premier temps de « marquer les esprits » et de faire bouger les lignes en interne par une première réalisation. Le premier cas d’usage prend donc la forme d’une apparition lors de la première fashion week du métavers.
Nous devrions être la seule marque française à disposer de sa boutique dans la fashion week de Decentraland”, se félicite la cadre dirigeante d’IKKS.
Valérie Dassier est réaliste : la finalité n’est ici pas financière. Cette action s’inscrit dans le court terme et vise un impact d’image. Pour mener ce projet, IKKS s’associe à une startup crypto-native, spécialisée au départ dans le gaming.
La DGA nous confie avoir rencontré de nombreux prestataires, et tous sont loin de se valoir sur le marché. « J’ai vu tout et n’importe quoi dont des agences qui faisaient du métavers depuis 15 jours ». Elle a donc finalement opté pour un acteur maîtrisant nativement les technologies du Web3, les business models associés, et capable de les adapter à son métier.
« Nous avons déjà plus d’une dizaine de projets sur la table… qui ne se feront certainement pas tous », explique Valérie Dassier, qui reconnaît que l’évolution constante de ces technologies et des usages nécessitera une agilité et une adaptation constante.
Des clients IKKS à acculturer au Web3
Les futures initiatives ne sont donc pas arrêtées. L’idée générale est de tirer profit de la complémentarité entre métaverse et NFTs. Plusieurs scénarios sont ainsi possibles. Parmi ceux-ci, une transposition du métier de retailer dans le métaverse. Le second consiste à développer une communauté sur ces plateformes et d’y associer des options d’achat et des offres exclusives.
Il y a un troisième axe qui est de faire des coups business, comme des collections de NFT”, cite encore la dirigeante.
La création d’une boutique dans Decentraland relève du premier scénario. Mais pour Valérie Dassier, l’avenir n’est sans doute pas là. Elle privilégie la 3e option, des coups, qui permettront de financer le développement de communautés.
« Je vais financer mes initiatives et ma roadmap moyen terme par mes opérations court terme », explique-t-elle à Coins.fr. Parallèlement, elle s’interroge sur l’opportunité de conserver sous forme de tokens les bénéfices réalisés dans l’univers crypto et ainsi de générer des revenus passifs via la croissance des cours des actifs numériques.
Ce n’est pas mon métier de base, mais dans un contexte économique aussi difficile de baisse de la fréquentation en boutique, cela peut-il être un moyen de compenser une tension sur les revenus ?”, s’interroge la DGA d’IKKS. Le scénario est en tout cas sur la table.
Pragmatique, Valérie Dassier rappelle que l’environnement est en évolution constante et rapide et que l’adoption du Web3 se fera de manière progressive. Cela se justifie en particulier par le faible taux de pénétration de ces technologies parmi les consommateurs. La mise en œuvre se fera au rythme de l’acculturation des clients, et notamment des clients existants de la marque.
Démontrer le potentiel pour convaincre en interne
Ma priorité va être d’investir ce monde. La seule chose que je prévois de ramener dans le monde physique, c’est les codes graphiques. La patte en termes de design sur OpenSea n’a pas d’équivalent aujourd’hui dans le monde réel. Je veux insuffler dans ma création produit cette influence graphique dite NFT”, annonce la directrice d’IKKS.
L’appropriation des technologies crypto et de leurs usages en interne sera donc progressive, et commence par l’exploration et de premières actions à forte visibilité. Trop tôt donc pour enclencher un large programme d’acculturation du top management sur le métavers et le Web3.
Je ne suis pas dans une phase de pédagogie. Je déroule un plan dans un mode bulldozer défini en très petit comité. C’est lorsque les premiers résultats seront significatifs et convaincants que nous mènerons une seconde phase, qui comprendra notamment de l’acculturation des équipes. Il faut au préalable avoir des résultats afin de démontrer l’intérêt et le potentiel”, conclut Valérie Dassier.
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