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Crypto-actifs : l’Afrique du Sud peaufine sa réglementation

Pretoria, Afrique du Sud - Crédit : Shutterstock

Confrontée à plusieurs escroqueries d’envergure aux cryptomonnaies, l’Afrique du Sud, via son organisme de surveillance financière (FCSA), va poser les jalons d’un cadre réglementaire destiné à se prémunir contre ce type de fraudes.

 

L’affaire avait fait grand bruit au point de s’étendre au-delà des sphères de l’écosystème crypto et traverser les continents. En juin dernier, les frères Ameer et Raees Cajee, fondateurs de la plateforme de trading sud-africaine Africrypt s’étaient évaporés dans la nature avec l’équivalent de 3,6 milliards de dollars en devises numériques (ou 69 000 bitcoins rapportés à son plus haut cours d’avril 2021).

Soi-disant victimes, selon leurs dires, d’une cyberattaque, le tandem avait suscité la suspicion après avoir demandé à ses clients de ne pas signaler « l’incident » aux autorités, de peur que cela ne ralentisse le processus de récupérations des devises finalement perdues dans les méandres du darknet, rendant par essence leur traçabilité impossible.

Une gigantesque fraude qui a enjoint l’Afrique du Sud et son organisme de régulation, la « Financial Sector Conduct Authority » (FCSA) à prendre les devants pour encadrer un secteur en plein essor. L’idée est donc d’instaurer un ensemble de règles afin de protéger davantage les investisseurs. Pour rappel, la FCSA n’avait pas pu, à l’époque de la fraude des frères Cajee, mener une enquête formelle dans la mesure où les crypto-actifs n’étaient pas considérés comme des produits financiers légaux. D’où la volonté pour le régulateur d’instaurer un cadre légal.

Ainsi, selon Unathi Kamlana, commissaire de la FCSA, la nouvelle réglementation sur les crypto-actifs – rédigée de concert avec les institutions financières locales – abritera en son sein des dispositions régissant les échanges de devises numériques dans le pays.

Nous voulons pouvoir être en mesure d’intervenir rapidement lorsque nous pensons que les produits qui sont fournis aux clients de ces plateformes s’avèrent, à nos yeux, potentiellement très risqués. Nous devons absolument faire attention à ne pas légitimer ces pratiques, a expliqué le commissaire dans les colonnes de Bloomberg.

Pour autant, ce dernier a tenu également à ne pas « diaboliser » l’écosystème crypto, arguant que ces devises numériques ne posaient pas de problèmes systémiques pour la stabilité de l’ensemble du secteur financier sud-africain.

Le régulateur, par la voix de son commissaire, a également annoncé « surveiller l’avancée des travaux » de la banque de réserve sud-africaine (équivalent de la banque centrale) concernant l’émergence d’un stablecoin – monnaie numérique dont le cours est adossé à une devise, en l’occurrence ici le Rand – qui représente, aux yeux d’Unathi Kamlana, « l’approche la plus raisonnable en matière d’innovation ». Une approche similaire à celles des banques centrales nigériane et tanzanienne.

« Si je devais donner un conseil aux investisseurs, je les enjoindrais à faire montre de patience, en attendant de voir ce qui sortira des travaux de la banque centrale qui pourrait proposer une devise par définition plus stable et moins volatile que les crypto-actifs tels que le Bitcoin, l’Ethereum ou le Litecoin ». Un conseil qui risque de se muer en vœu pieu, la patience n’étant pas la qualité première des investisseurs et autres férus de crypto-actifs. A fortiori en Afrique où le recours aux devises numériques fait office d’alternative à un système bancaire réputé pour son conservatisme et son manque de flexibilité.

Samir Hamladji
Rédacteur et reporter - Journaliste pour plusieurs grands médias tels que LesEchos ou Challenges, Samir a été en charge de la rubrique Finance chez Forbes de 2016 à 2019. Il s'intéresse depuis plusieurs années à l'écosystème des crypto-monnaies et de la blockchain.