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Avec ses frais, Meta confirme sa vision du métaverse et de sa monétisation

Crédit : Shutterstock

De premiers créateurs sont autorisés à vendre des biens numériques dans Horizon Worlds, l’univers virtuel de Meta. Avec des frais de 47,5% sur chaque transaction, le géant accentue le fossé entre métaverse ouvert et fermé.

 

Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook, a fait du métaverse une priorité stratégique pour sa firme. Et pour le souligner, le PDG annonçait des recrutements massifs dans ce secteur et une nouvelle identité.

Meta entend dominer le métaverse, comme elle le fait aujourd’hui avec les réseaux sociaux. Mais comme aiment à le rappeler les acteurs du Web3, le GAFAM n’en partage pas les principes, en particulier en termes de propriété et de partage de la valeur.

Un métaverse où la plateforme capte l’essentiel de la valeur

Meta a envoyé un signal fort en la matière cette semaine. Son univers virtuel, Horizon Worlds, permettra à de premiers créateurs triés sur le volet de proposer à la vente des biens numériques.

Ces actifs, qui ne sont pas des tokens ou NFT, seront disponibles depuis la marketplace de l’application, le Meta Quest Store. La commission appliquée par l’entreprise sur chaque transaction fait bondir la communauté NFT et crypto.

Comme le rapporte TheBlock, Meta prélève au total 47,5% de frais sur chacune des ventes réalisées par les créateurs depuis son store. Cette part se décompose ainsi : des frais de 30% pour le Meta Quest Store, auxquels s’ajoute une commission de 17,5%.

Le chiffre est confirmé par Meta auprès de CNBC. Rappelons à titre de comparaison que des marketplaces NFT comme OpenSea appliquent une commission d’en moyenne 2 à 3%. Un métaverse comme The Sandbox prélève quant à lui 5% de frais sur les transactions.

Biens numériques Vs NFT et propriété

Le montant de ces commissions n’est cependant pas la seule différence entre le métaverse d’un géant du Web2 comme Meta et une plateforme du Web3. La propriété est une différence tout aussi notable.

Dans le Web2, les utilisateurs ne sont pas réellement propriétaires des biens numériques dont ils font l’acquisition. Ils achètent avant tout un droit d’utilisation attaché à un service. S’ils quittent ce service, ils ne conservent pas leurs biens.

Le modèle est tout à fait différent dans le Web3 en raison du fonctionnement même des tokens non fongibles. Ces jetons sont acquis et conservés sur un wallet par leur propriétaire. Les créateurs disposent eux aussi d’un statut différent.

Quelques mois plus tôt, Zuckerberg s’engageait pourtant à rendre le métaverse plus accessible aux créateurs. Il critiquait notamment la commission de 30% appliquée par Apple sur l’App Store.

Les métaverses ouverts doivent massifier la base d’utilisateurs

Avec un taux à 47,5%, Meta semble mettre des barrières à l’entrée de ce marché émergent. Ce n’est pas si sûr cependant. Comme pour la publicité sur les réseaux sociaux, Meta a pour lui une capacité à créer un marché de millions d’utilisateurs.

En comparaison, des plateformes comme Decentraland ne disposent que de quelques milliers d’utilisateurs par jour. Les services du Web3 ne bénéficient pas encore d’un marché de masse permettant à des marques d’accéder à une grande base de clients.

Les frais ne devraient ainsi pas nécessairement constituer un obstacle rédhibitoire à la croissance de Meta dans le métaverse. Toutefois, sa stratégie illustre bien les différences fondamentales entre deux visions du métaverse et de sa monétisation.

 

Ces différences ont d’ailleurs été discutées lors d’une table ronde du Paris NFT Day le 12 avril dernier. Son intitulé : « Big Tech vs métaverse ouvert : pouvons-nous gagner ? » Rahim Attaba, directeur marketing de The Sandbox, déclarait lors de ce débat que l’objectif de la plateforme n’était pas de capturer la valeur générée sur The Sandbox par ses utilisateurs, mais de la redistribuer.

Des commissions excessives sur des marchés gigantesques

Rahim Attaba indiquait ainsi que lors d’une récente phase d’expérimentation de plusieurs semaines, le métaverse avait reversé environ 10 millions de tokens SAND. Cela équivaut à 30 millions de dollars, précisait-il. Cette approche se démarque de celle des Big Techs.

Rahim Attaba

Rahim Attaba, directeur marketing de The Sandbox, lors du Paris NFT Day 2022 – Coins.fr ©

Néanmoins, grâce à des marchés captifs de masse de centaines de millions d’utilisateurs, les Gafam créent aussi de la richesse pour des tiers. En contrepartie, ils en captent une part conséquente et imposent leurs règles, comme Apple sur l’App Store. En 2021, la firme de Cupertino annonçait avoir redistribué 60 milliards de dollars aux développeurs.

Le modèle futur du métaverse dépendra donc de ses caractéristiques, mais aussi de la taille des bases d’utilisateurs que ces plateformes parviennent à réunir et de l’efficacité de leur stratégie de monétisation pour les marques. Et en la matière, les géants du Web2 disposent d’une solide expérience et de moyens colossaux.

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Christophe Auffray
Cofondateur et rédacteur en chef adjoint - Journaliste spécialiste de la transformation numérique depuis 2005, Christophe a notamment été rédacteur en chef adjoint chez ZDNet. Il suit de près l’actualité autour des actifs numériques et la décrypte au quotidien. Contact : christophe@coins.fr