Pour RBC Wealth Management, la Federal Reserve ne dispose pas de motivations suffisantes pour accélérer ses projets en matière de CBDC. La banque centrale devrait donc prendre son temps et privilégier une approche incrémentale.
Selon la Banque des règlements internationaux, la majorité des banquiers centraux (93%) sont aujourd’hui « engagés dans une certaine forme de travail » autour des monnaies numériques de banque centrale.
Les projets tardent cependant à se concrétiser, en particulier dans les économies les plus développées. Pour l’analyste Atul Bhatia de Royal Bank of Canada, pas de doute, les banques centrales « progressent lentement » dans ce domaine des CBDC.
Un complément aux systèmes existants plus qu’une révolution
Les institutions en sont à réaliser « de petits pas sur une longue route », mais pas nécessairement à tort. Car pour l’expert, il n’y a pas lieu de se précipiter en raison de la complexité de ces projets et des gains associés.
Les CBDC doivent être considérées comme un complément aux systèmes bancaires et de paiement existants. Nous voyons une évolution, pas une révolution », commente le représentant de RBC Wealth Management.
Du côté de la Federal Reserve, la monnaie numérique de banque centrale ne constitue assurément pas une priorité. Une telle monnaie ne serait en outre pas sans présenter des risques importants, notamment pour la stabilité.
Nous pensons qu’avoir un seul point de défaillance pour les paiements en dollars dans un monde qui utilise le billet vert pour toutes sortes d’échanges est, en un mot, une très mauvaise idée », considère ainsi Atul Bhatia.
Un risque cyber majeur comme obstacle
Le premier danger serait celui de la cyberattaque, de la part de pirates, mais aussi potentiellement de « terroristes ou des rivaux géopolitiques ». Pour l’expert, « un simple coup d’œil » à l’histoire de la sécurité numérique montre les risques liés à la centralisation des données et des richesses.
RBC estime que la sécurisation des systèmes informatiques nécessaires à une CBDC retail ou wholesale représenterait une tâche herculéenne pour la Fed. La banque voit aussi dans la monnaie numérique un risque au niveau de la vie privée. Quid alors des bénéfices ?
Dans l’ensemble, nous pensons qu’il est difficile de présenter des arguments théoriques solides en faveur de l’adoption d’une infrastructure CBDC. Les avantages en termes d’efficacité sont réels et significatifs, mais ils ne peuvent tout simplement pas justifier la création d’un point de défaillance unique dans l’infrastructure de paiement critique », tranche la RBC.
La banque table donc sur une lente émergence d’un dollar numérique. Et en matière d’innovation financière, les États-Unis se montreraient pour le moins conservateurs. Une illustration ? « Ils ont été l’un des derniers pays à mettre en place des cartes de crédit à puce ».
Les réticences de l’industrie financière
Mais les États-Unis restent en outre le plus grand utilisateur de chèques papier au monde. Cet attachement serait dès lors peu compatible avec l’adoption de portefeuilles de monnaie numérique – au moins sur un plan culturel.
Par ailleurs, la Fed doit composer avec « une forte réticence de la part des acteurs actuels de l’infrastructure financière », dont les deux plus grands réseaux américains de cartes de crédit.
Une CBDC pourrait menacer leurs plus de 50 milliards de dollars de revenus. Mastercard et Visa sont loin d’être inactifs dans ce secteur cependant. Le premier dispose par exemple du CBDC Partner Program, auquel participent, entre autres, ConsenSys, Fireblocks et Ripple
Pour des multiples raisons, RBC estime quoi qu’il en soit que l’adoption de la monnaie numérique s’opérera de manière incrémentale. Et pas seulement au pays du billet vert.
Nous pensons que la Fed et la plupart des autres banques centrales adopteront une approche plus mesurée, en intégrant étroitement la technologie pour atteindre l’efficacité, mais en opérant en parallèle avec les structures de paiement existantes. »
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