Pour les grands de la finance traditionnelle, la démocratisation de l’investissement, notamment dans les actifs numériques, passe par l’éducation financière, la confiance et la technologie.
La NFT Factory et ses fondateurs se fixent comme ambition de démocratiser l’usage et la détention de NFT. Mastercard souhaite lui encourager la démocratisation du crypto-trading chez les banques. Pour une fintech comme Lydia, cette démocratisation passe par la simplification de l’accès à l’investissement.
Démocratiser, cet objectif concerne tous les acteurs de la finance, numérique comme traditionnelle. Cette démocratisation ne repose cependant pas sur une seule catégorie d’actifs ou sur un unique levier d’action.
La crypto : ruée vers l’or et train à ne pas manquer
Les institutionnels de la finance traditionnelle (TradFi) ne partagent en outre pas les mêmes priorités que leurs homologues de la DeFi ou crypto-natifs. Ainsi, pour Emmanuelle Mourey, présidente du directoire de la Banque Postale Asset Management, la crypto tient encore aujourd’hui « de la ruée vers l’or à l’ère du far west ».
La dirigeante s’exprimait à l’occasion de la conférence AM Tech Day. Ces déclarations soulignent en partie les excès d’un marché naissant. Mais pas seulement.
Sur les cryptos, l’enjeu, c’est de rester en veille pour ne pas rater le train. Car cela va prendre”, assure Emmanuelle Mourey.
Néanmoins, l’industrie financière a d’autres enjeux. L’investissement Socialement Responsable (ISR) nécessite actuellement du secteur de conséquents investissements, sur la donnée et sur les compétences. Ces dépenses doivent en outre se traduire par de la performance financière, une priorité pour tous.
Sur le private asset, le sujet c’est la liquidité, c’est-à-dire la manière d’offrir de la liquidité sur des produits qui par essence ne sont pas liquides”, note la représentante de la Banque Postale AM.
Démocratiser sur un marché très fragmenté
A chaque segment ses propres enjeux de démocratisation. Une convergence est cependant possible, et même souhaitable. « Le plus gros défi selon moi, c’est de démocratiser l’accès au patrimoine », considère ainsi Guillaume Lesage, directeur général délégué d’Amundi Asset Management.
C’est ce qu’il y a de plus compliqué. On parle de crypto, blockchain, etc., mais le vrai sujet, à mon sens, c’est d’être capable de démocratiser l’accès à l’investissement pour les particuliers. Et c’est un défi complexe », ajoute-t-il.
Début 2022, KPMG estimait la part des Français ayant déjà investi dans les crypto-actifs à 8%. Un chiffre supérieur à celui de la détention d’actions en propre (6,7% selon l’AMF). Les 12% de crypto-investisseurs attendus par l’étude fin 2022 pourraient ne pas être atteints en raison du bear market et d’un nouvel épisode de défiance déclenché par des faillites comme Luna, Celsius et plus récemment FTX.
Afin de démocratiser l’investissement, le digital a un rôle important à jouer, grâce par exemple au déploiement de robot advisor. Guillaume Lesage juge cependant l’offre digitale actuelle « très parcellaire, fragmentée et trop complexe ». Le cadre d’Amundi appelle donc à une simplification des solutions d’investissement.
Objectif ‘retailisation’ de l’investissement
La « retailisation » de l’investissement passe donc selon lui par l’agrégation, une technologie fluide et simple d’accès, une combinaison de l’humain et du digital, et le multi-produits. « La perfection, ce n’est pas quand il n’y a plus rien à ajouter, mais lorsqu’il n’y a plus rien à retirer », cite-t-il pour illustrer la tâche à accomplir.
La technologie et sa simplicité sont des leviers, mais leur développement doit s’accompagner parallèlement d’un travail autour de l’éducation financière, soulignent les membres du panel. « C’est un élément clé », insiste Yoan Chazal, associé pour la branche investment management services de Deloitte.
On a très peu d’investisseurs individuels en France, mais c’est aussi un pattern européen, sur les marchés de capitaux”, rappelle-t-il.
Et ce bilan a ses raisons, dont la problématique d’accès, adressée par les technologies, n’est pas la principale. « Ils n’investissent pas car ils se disent que ce n’est pas pour eux. Ils ne connaissent ni ne maîtrisent pas », témoigne le consultant.
Ce constat est directement lié au sujet de la confiance, considère-t-il encore. Or, dans ce domaine, les institutions financières pâtissent d’un faible niveau de confiance. Ce frein n’est cependant pas nécessairement rédhibitoire.
Un investisseur a plus confiance, même si le niveau n’est pas dingue, dans sa banque que dans une fintech pour gérer ses économies.”
Les fonds de private equity en transformation
Sur le marché du private equity, la confiance est un paramètre, mais pas le seul. Joseph Pinto, directeur distribution internationale de Natixis IM, insiste sur le volet technologique au bénéfice des opérations. L’automatisation permise par le digital sera indispensable pour démocratiser et servir un plus grand nombre de clients.
Beaucoup de fonds de private equity n’ont pas forcément investi dans le middle office et la technologie parce qu’ils avaient l’habitude d’avoir quelques souscriptions par mois de plusieurs centaines de millions d’euros en termes de tickets. Ils savaient le faire manuellement”, détaille Joseph Pinto.
La démocratisation modifie cependant radicalement le business model en imposant de gérer des centaines, voire des milliers, de souscriptions par des investisseurs chaque semaine.
Digitaliser est critique si vous voulez ensuite démocratiser”, prévient le CEO de Natixis IM International.
Rassurer l’investisseur par le digital et l’humain
Dans cette perspective, les entreprises peuvent refondre leurs systèmes d’information, ou aussi s’appuyer sur des fintechs afin d’accélérer la transformation.
En matière de démocratisation de l’investissement, Guillaume Lesage d’Amundi, revient néanmoins sur la nécessité plus macro de « rassurer l’investisseur ».
L’offre est pléthorique, mais trop compliquée. Il faut donc le rassurer sur le fait qu’il ne prend pas de risques, qui sont de différentes natures. Pour cela, la technologie doit être robuste et donner le sentiment à l’investisseur qu’elle est moderne »
« (…) Le deuxième point, c’est la robustesse dans la gestion des risques. Enfin, c’est le conseiller. A tout moment, le particulier souhaitant investir doit pouvoir accéder à un conseiller, compétent et disponible, et qui réassure sur l’investissement », conclut-il.
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