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Waltio lève 1,8M€ pour simplifier la fiscalité crypto

Le Français Waltio s’attaque à la complexité fiscale pesant sur la crypto et mise sur la démocratisation de l’investissement. La startup lève 1,8 million d’euros auprès d’acteurs spécialisés et de la TradFi pour accélérer sur les développements et l’international.

 

Les financements dans les fintech françaises sont en berne depuis 2022, mesure EY. Les entreprises crypto n’y échappent pas. Certaines parviennent cependant à réunir des capitaux, à l’image par exemple de Fipto, Narval, Bitstack et désormais Waltio.

L’éditeur fondé en 2019 et spécialisé dans les déclarations fiscales annonce en effet une levée de fonds de 1,8 million d’euros. L’opération a été menée auprès de business angels et d’institutionnels : Clément Coeurdeuil (Budget Insight), Joan Burkovic (Bankin’), Owen Simonin (alias Hasheur), Julien Bouteloup (Stake Capital) et le Crédit Agricole Capital Développement.

« L’opinion a compris l’intérêt du Web3”

Pierre Morizot, son CEO et cofondateur – aux côtés de Benjamin Chevallereau -, souligne dans une interview à Coins.fr la complémentarité entre ces investisseurs issus à la fois de la finance traditionnelle et de l’industrie crypto. Le signe selon lui d’une démocratisation des actifs numériques.

Le dirigeant anticipe d’ailleurs la progression de la maturité du marché, en France, mais aussi ailleurs en Europe et dans le monde. Malgré le bear-market et la multiplication des plans de licenciement, Pierre Morizot relève des signes encourageants.

Il cite d’abord la capitalisation des crypto (1,3 milliard de dollars) et la forte hausse des cours depuis le 1er janvier. Mais cette maturité croissante, le CEO l’étaye aussi par le recul du trading pur au profit d’autres usages.

L’intérêt des institutionnels est aussi plus prégnant (…) Il y a un véritable changement de paradigme en ce qui concerne la perception de l’utilité des cryptomonnaies (…) Je pense que l’opinion a compris l’intérêt du Web3”, juge-t-il.

25.000 utilisateurs dans 3 pays d’Europe

Le secteur a gagné en sérieux, même si le patron de Waltio ne passe pas sous silence les scandales et les risques de fraude.

Les trois premiers acteurs les plus susceptibles de décrocher l’agrément PSAN sont trois grandes banques françaises et non des pure-players”, déclare-t-il pour illustrer l’intérêt des institutionnels et la maturité acquise.

De fait, sa levée de fonds fédère crypto-natifs et fonds d’investissement du Crédit Agricole. L’existence des fondamentaux et la résilience du secteur sont aussi essentiels pour Waltio et ses perspectives de développement à court et plus long termes.

La startup s’est spécialisée à sa création dans l’aide aux déclarations fiscales des contribuables détenteurs de crypto-actifs, en France, puis en Belgique et en Espagne. L’entreprise compte 25.000 utilisateurs actifs.

Des partenariats avec les exchanges pour tirer la croissance

Une démocratisation de la crypto signifie plus de détenteurs, une fiscalité affinée dans les États sur ces actifs et donc une demande accrue de la part des contribuables. D’après une étude KPMG pour l’Adan, 8% de Français détiennent de la crypto.

Waltio espère convertir une part significative de cette population à sa technologie, en vente directe ou grâce à des partenaires distributeurs comme des PSAN. La jeune pousse a déjà conclu différents accords nationaux et internationaux, dont Bitstack et Bitstamp depuis juin 2023.

Pierre Morizot cite aussi Meria, StackinSat, Paymium et une intégration récente dans Ledger Live. Waltio ambitionne d’accélérer sur ce volet distribution au travers de partenariats avec des exchanges.

Ces collaborations ont pour but de garantir l’exhaustivité des remontées de transactions et aussi de leur permettre de fournir des solutions plus complètes en termes d’investissement, de l’achat des crypto jusqu’à la déclaration fiscale”, précise le CEO.

Développer un outil plus intelligent et intégrer des fonctionnalités

Son expertise, Waltio est ainsi prêt à la mettre à disposition des intermédiaires financiers du marché crypto, mais aussi des États.

Aux États-Unis, des logiciels fiscaux comme les nôtres ont fourni des solutions au gouvernement pour faciliter la traçabilité des informations”, détaille-t-il.

Les services fiscaux constituent ainsi un marché potentiel, à terme, pour la startup. A plus brève échéance, les axes prioritaires de l’entreprise se situent au niveau produit et distribution.

L’éditeur, dont la solution est proposée actuellement en abonnement annuel (avec du gratuit et du payant) souhaite proposer une « outil plus intelligent » avec du « suivi automatisé de transactions » via notamment des fonctionnalités de reporting.

Initialement, l’application était essentiellement utilisée à l’occasion de la période fiscale des déclarations d’impôts. Waltio veut intensifier et encourager les usages toute l’année en fournissant du conseil et une vision globale sur le patrimoine crypto – généralement réparti sur des plateformes multiples.

Cette évolution des usages s’accompagnera d’une nouvelle formule d’abonnement, qui devrait passer à terme d’une fréquence annuelle à un rythme mensuel, suggère le CEO à Coins.fr.

L’abonnement sera-t-il toujours annuel dans 2 ans ? Il y a des chances que non.”

De nouveaux actifs (DeFi et NFT) dans l’outil

La trajectoire produit de Waltio, c’est « plus de fonctionnalités, une simplification du calcul des plus-values, des informations sur l’évolution de son portefeuille et de son patrimoine en cryptomonnaies ».

Nous voulons apporter plus d’aide aux utilisateurs sur la conformité, par exemple en cas de rapatriement bancaire. Ce type d’évènement est l’opportunité de réunir des informations et de produire un dossier  augmentant la probabilité que la banque accepte le dépôt en garantissant l’origine des fonds”, illustre-t-il encore.

Outre le reporting et le conseil, le produit SaaS de Waltio va s’enrichir également d’autres catégories d’actifs, dont la DeFi et les NFT. Parmi ses priorités, la startup insiste aussi sur la collaboration avec les exchanges et les gouvernements dans le domaine de la conformité.

En Europe, la réglementation (dont DAC8) renforce les obligations des plateformes dans ce secteur. Les échanges automatiques de données entre les autorités fiscales encouragent aussi à une amélioration des pratiques déclaratives. En 2027, ce sont 47 pays de l’OCDE qui coopéreront en ce sens.

Pression fiscale et cours des crypto comme moteurs

Le facteur réglementaire est un levier de croissance pour la startup française, dont l’objectif fixé à sa création en 2019 était d’atteindre le million d’utilisateurs d’ici 10 ans. Cette cible n’est pas remise en cause, même si Pierre Morizot le reconnaît, le chiffre est « ambitieux ».

Pour l’atteindre ou s’en rapprocher, il met en avant l’assainissement du secteur, sa plus forte régulation, la demande institutionnelle et le développement de nouveaux profils d’investisseurs, plus soucieux du respect de leurs obligations fiscales.

Deux critères sont critiques pour tirer l’adoption d’une application comme celle de Waltio, cite le CEO : la pression fiscale ressentie par les détenteurs de tokens et donc l’engagement des politiques dans la lutte contre l’évasion fiscale crypto, mais aussi l’évolution des cours.

La fiscalité du staking au Parlement

La hausse des prix est synonyme de plus-values en France et donc d’imposition en cas de vente. Le cadre français ne tient pas compte en revanche des moins-values et ces résultats justifient donc moins l’usage d’une solution de calcul.

La fin d’année 2023 nous permettra d’évaluer plus précisément la demande sur notre outil l’an prochain”, commente le cofondateur de la startup.

D’autres rendez-vous l’attendent, comme le vote de la loi de finance au Parlement au cours des prochaines semaines. La législation devrait entériner la fiscalisation des revenus du staking.

La disposition est proposée par un député de la majorité présidentielle. Au niveau européen, d’autres projets sont à l’étude, par exemple afin de préciser le statut des stablecoins (monnaie numérique ou actif) et donc si un événement imposable s’y rattache.

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Christophe Auffray
Cofondateur et rédacteur en chef adjoint - Journaliste spécialiste de la transformation numérique depuis 2005, Christophe a notamment été rédacteur en chef adjoint chez ZDNet. Il suit de près l’actualité autour des actifs numériques et la décrypte au quotidien. Contact : christophe@coins.fr