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Sorare, Ledger, Kaiko… Les pépites Web3 françaises de 2022 et 2023

Web awards
Crédit : Shutterstock

NFT, crypto, metaverse ou gaming, l’écosystème français compte déjà des licornes et des startups à fort potentiel. Coins.fr a dressé une liste de pépites qui ont marqué 2022 et à surveiller de près en 2023.

 

Ledger : une licorne qui s’affirme toujours plus

Suite à sa levée de fonds de 380 millions de dollars en 2021, Ledger est devenu la première licorne française de la crypto-monnaie et la 15e licorne tricolore. 2022 a été une année dynamique pour le fabricant de wallets hardware, sur un marché qui se démocratise, malgré le bear market.

Son PDG, Pascal Gauthier, le confiait à Coins.fr l’été dernier, Ledger commercialise désormais deux à trois millions de terminaux chaque année. Et il ne compte pas s’arrêter là. La licorne se verrait bien en Apple du Web3. Pour traduire ses ambitions, elle a lancé, avec Tony Fadell, le « papa de l’iPod », le Ledger Stax.

L’entreprise construit aussi ses revenus futurs avec la carte Crypto Life en Europe, une marketplace NFT, le développement de Ledger Live, un partenariat avec Sandbox pour sécuriser le metaverse ou encore la création d’un fonds de 100 millions de dollars avec Cathay Capital. En raison de l’hiver crypto, le fonds repense d’ailleurs ses cibles d’investissement pour privilégier des technologies plus matures.

Sorare : le foot, et pas seulement

Sorare est la 2e licorne crypto française après une levée de fonds record de 680 millions d’euros en septembre 2021. Son fondateur et patron Nicolas Julia prévenait : « Les NFT vont réinventer certaines industries ». Et bear market ou non, ce scénario semble en effet se dessiner.

Pour Sorare, la priorité, c’est de réinventer la relation entre les fans de sport et les clubs. Son univers de départ, le football, reste bien sûr capital pour la pépite hexagonale, depuis 2022 membre du Next 40. Pour porter sa bannière, elle peut compter sur des ambassadeurs de luxe comme Kylian Mbappé et Zidane.

Nicolas Julia Sorare

Nicolas Julia, CEO de Sorare

Mais l’univers de Sorare, c’est bien le sport, dans son ensemble. Outre l’ajout de nouvelles ligues de foot, comme la Serie A italienne, Sorare s’est lancé cette année dans d’autres sports, dont le baseball aux États-Unis, et le basket avec la NBA. Avec Serena Williams comme conseillère, qui sait ce que réserve 2023.

Kaiko : finance crypto et TradFi réconciliées

Kaiko a réalisé en 2022 l’une des plus importantes levées de fonds des entreprises françaises de la crypto : 53 millions de dollars en série B. Un an plus tôt, en série A, ce sont 24 millions de dollars qui étaient réunis par la startup fondée en 2014. Le cœur de business de Kaiko, ce sont les institutionnels et leur besoin de disposer de données de qualité.

Au cours de la prochaine année, nous consoliderons notre position de leader du secteur des solutions de données institutionnelles, servant de pont essentiel entre les marchés financiers centralisés et décentralisés », déclarait en juin dernier Ambre Soubiran, PDG de Kaiko.

De par son positionnement, Kaiko fait naturellement le pont entre TradFi et finance 3.0. Et l’ambition de la pépite va plus loin encore. Son terrain de jeu : la tokenisation de l’économie, comme nous l’indiquait dans une interview Élodie de Marchi, sa COO. Dans cette perspective, l’éditeur acquérait Napoleon Index et signait un partenariat avec Deutsche Börse. Avec l’institutionnalisation de la crypto, Kaiko a vraisemblablement de beaux jours devant elle.

Arianee masque la complexité du Web3

Le Web3, avec les jetons, la blockchain, son vocabulaire technique et ses codes, ne manque pas de complexité. Maîtriser cette complexité tout en la masquant pour permettre des usages réels et utiles pour le grand public, c’est l’ambition d’Arianee.

Autre pépite française, elle levait 20 millions d’euros en mai. Elle compte parmi ses clients des grands noms, qui n’ont rien de crypto-natifs : Printemps, Breitling, Vacheron Constantin, Paris Fashion Week, Panerai…

Pierre-Nicolas Hurstel arianee

Pierre-Nicolas Hurstel, patron et cofondateur d’Arianee

Pierre-Nicolas Hurstel, CEO et cofondateur d’Arianee – prononcer « Ariani », résume ainsi la mission de la startup :

Le web3 est en train de conquérir le monde et nous pensons que les marques devraient tirer parti de cette révolution pour reprendre le contrôle de leur présence et de leurs données sur Internet. »

La conquête commence à peine et elle ne manquera pas de se prolonger en 2023. Arianee entend assurément se placer aux premiers rangs.

Arquant Capital et Société Générale modernisent la finance

C’était une première en 2022. Arquant Capital peut en effet se targuer d’être pionnier en France en obtenant l’agrément de société de gestion de portefeuille de fonds d’investissement alternatif (AIFM).

Fondée en 2019, la société ambitionne d’offrir un accès privilégié – et un accompagnement dédié – aux investisseurs professionnels (institutionnels, banques privées, family offices et corporates) sur le front des crypto-actifs.

Autre première, quelques mois plus tard : Arquant Capital lançait deux fonds régulés directement exposés à Bitcoin et Ethereum.

Les prix d’entrée sont très intéressants par rapport à ce qu’on a vécu. On sait en outre très bien que la technologie blockchain, le sous-jacent de la crypto, a un bel avenir devant elle. C’est un boulevard qui s’ouvre », soutenait son CEO Eron Angjele.

Dans ce projet, Arquant et son PDG ont bénéficié du support de deux partenaires très impliqués dans la transformation de la finance et sa régulation. Ils peuvent aussi prétendre au statut de pépites françaises crypto. Il s’agit de Société Générale (via SGSS et SG Forge dirigé par Jean-Marc Stenger) et du cabinet Osborne Clarke (auquel appartient la renommée Karima Lachgar), impliqué dans un très grand nombre de dossiers d’enregistrement PSAN.

PyratzLabs et Dogami réunis par Bilal El Alamy

Bilal El Alamy, que l’écosystème crypto français connaît bien, participe à de multiples projets crypto. Outre Equisafe, l’entrepreneur intervient aussi au sein de PyratzLabs et de Dogami, entre autres. Or les deux entreprises se sont distinguées en 2022. Et elles s’efforceront certainement de faire parler d’elles cette année encore.

Ainsi, PyratzLabs, un startup-studio spécialisé, a levé 3 millions de dollars pour façonner « de futurs champions européens web3 ». Pour Julien Pageaud de Sparkle Ventures, l’un des investisseurs, en « adoptant ce modèle de création, PyratzLabs est idéalement positionné pour devenir le Y-Combinator du Web3 ».

A son catalogue, le studio compte notamment Dogami, qui en 2022 a réalisé une seconde levée de fonds. Au total, l’éditeur du jeu basé sur les NFT a levé 14 millions de dollars, notamment auprès d’Ubisoft. Pour Bilal El Alamy, CTO Dogami interviewé l’an passé, l’ambition est simple : « réinventer les Tamagotchi avec des NFT ».

Coinhouse démarre en trombe, puis trébuche

2022 avait excellemment démarré pour Coinhouse avec une série B de 15 millions d’euros en janvier. En juin, un nouveau tour de financement était réalisé, pour 40 millions d’euros cette fois. Dans un entretien, son PDG Nicolas Louvet nous détaillait les 4 priorités de la crypto banque française : grandir sur l’asset management, constituer un réseau de partenaires, développer les paiements et faire des acquisitions ciblées.

Tout s’annonçait bien pour Coinhouse malgré un contexte forcément difficile en raison des conditions de marché et de la situation économique. Mais la chute de FTX et la crise de liquidité chez Genesis sont venus assombrir le tableau en obligeant la startup à geler certains de ses livrets, gérés par des tiers.

En décembre, Coinhouse a proposé des accords à ses clients pour couvrir en partie les pertes. Malgré ces complications sur un marché crypto impacté par la contagion et l’effondrement de FTX, Coinhouse a encore des cartes à jouer. L’accord conclu avec Nortia pour apporter la crypto aux CGP en est une illustration. D’autres partenaires devraient suivre.

Coinhouse a recruté un expert de la finance traditionnelle pour développer les partenariats : Maxime Alazet. La pépite a trébuché, mais la crypto se pense sur le long terme. Elle peut donc prétendre à occuper une place dans une sélection d’acteurs français de référence. De fait, Coinhouse entend contribuer à l’intégration des actifs numériques « dans une logique patrimoniale de long terme » via l’ajout de cryptos dans « différentes typologies de portefeuilles ».

Morpho Labs : des « étudiants » prometteurs

Mark Zuckerberg est à la tête d’un empire valorisé plusieurs centaines de milliards de dollars. Peu après avoir quitté Harvard, il levait 500 000 dollars, puis 12,7 millions en 2005. Les fondateurs de Morpho Labs, dont Paul Frambot, ont fait mieux. Étudiants, ils levaient 18 millions de dollars.

Leur produit est pourtant autrement plus complexe qu’un réseau social. Pour convaincre des investisseurs, dont a16z, Morpho Labs a donc conçu en open source un protocole de prêt crypto baptisé Morpho et dont la gouvernance est assurée par une DAO.

Morpho est un optimisateur de protocole. Il permet d’emprunter et de prêter des cryptomonnaies de manière décentralisée, mais en optimisant l’efficacité des protocoles sous-jacents », détaillait dans une interview Paul Frambot.

En juillet, la TVL du protocole était de 30 millions de dollars après 3 semaines d’activité. Morpho visait le milliard de dollars de TVL fin d’année 2022. Parmi les pépites françaises de la DeFi, citons également Atlendis Labs.

Kiln veut institutionnaliser le staking

Malgré la morosité du secteur, Kiln, une startup tricolore qui propose des services de staking, bouclait un tour de financement de 17 millions de dollars en novembre 2022. Parmi ses investisseurs, des noms réputés comme Consensys, GSR et Kraken.

Pour Kiln, le marché du staking « s’institutionnalise ». Et la récente transition d’Ethereum sur un consensus PoS devrait pousser la demande pour le staking. JPMorgan anticipait des rendements en staking de 20 milliards de dollars en 2022, puis de 40 milliards d’ici 2025.

Seuls 12,5 % de l’offre d’ETH est staké, contre 50 à 80 % pour les autres actifs PoS. De plus, avec un pourcentage de rendement annuel sur l’ETH compris entre 6 et 7 % depuis la fusion, il offre un taux de rendement attractif pour les investisseurs », selon Kiln.

NFT Factory : la puissance du collectif français

Faire de la France un hub crypto nécessite de disposer d’un nombre suffisant de pépites, de licornes et autres champions. Mais l’économie Web3 française a besoin en outre d’un écosystème, c’est-à-dire d’interactions.

La NFT Factory, une œuvre collective, illustre bien cette ambition de favoriser les interactions et de développer un écosystème solide. Inaugurée en octobre, elle réunit 128 cofondateurs de différents domaines du Web3, de l’art comme de la finance.

Sa feuille de route depuis le 22 octobre et l’ouverture au public : acculturer et démocratiser les NFT et la crypto, exposer de l’art digital, mais aussi connecter les acteurs pour faire grandir l’écosystème et les usages.

La NFT Factory

La NFT Factory à Paris

Pour Jean-Michel Pailhon, son cofondateur et le chief of staff de la licorne Ledger, le Web3 promet l’émergence de nouveaux géants. La France compte d’ores et déjà des leaders, tels que Sandbox, Ledger et Sorare, cite-t-il.

Si dans 10 ans, ces leaders sont toujours les leaders mondiaux d’une industrie devenue gigantesque, la donne changera. La France et l’Europe bénéficieront alors d’un avantage industriel, et ce parce que nous aurons su être pionners. »

En raison de son rôle et de ses ambitions, la NFT Factory mérite naturellement de figurer dans cette sélection de pépite. Nul doute qu’elle sera également moteur en 2023 dans le développement de l’écosystème NFT français.

Casino : un retailer à la pointe de l’expérimentation Web3

Le groupe Casino n’est pas une pépite du Web3 à proprement parler, mais il n’en a pas moins développé des compétences dans ce secteur en multipliant les expériences et projets tout au long de 2022. C’est à ce titre un porte-étendard de ces technologies et de leurs usages.

Appuyés par des partenaires comme Onest et Arianee, le retailer et ses filiales ont par exemple lancé des NFT associés à des bouteilles de vin, un jeu sur The Sandbox avec des avantages réels à gagner, ou encore organisé des ateliers d’acculturation du consommateur en magasin.

Stéphanie Zolésio, Directrice générale exécutive de Casino Immobilier © Coins.fr

Stéphanie Zolésio, Directrice générale exécutive de Casino Immobilier

Avec ces usages, Casino crée des passerelles entre metaverse et monde physique. Pour son directeur du digital et de l’innovation, Ferdinand Tomarchio, il s’agit en particulier de « rapprocher les NFT du monde du retail ».

Mais le groupe détient aussi une filiale, Lugh, émettrice d’un stablecoin euro, pour laquelle « il y a un marché à saisir sur les cas d’usage crypto ». Il est sans doute le plus Web3 compatible de son secteur aujourd’hui.

La Banque de France : je t’aime moi non plus

Dans l’univers crypto, les banques centrales ne sont pas en odeur de sainteté. C’est le moins qu’on puisse dire. Celles-ci ont largement conspué, en Europe du moins, les stablecoins, Bitcoin et autres cryptomonnaies.

Et depuis la faillite de FTX, les banquiers centraux n’épargnent pas leurs critiques, que ce soit à la BCE ou à la tête de la Banque de France. Si les attaques ne sont pas neutres, elles ne sont pas pour autant sans fondements. L’affaire FTX traduit bien des lacunes fondamentales au sein de la jeune finance crypto. Et il faudra bien tôt ou tard y répondre, notamment en s’inspirant de la gestion des risques de la finance traditionnelle.

Guerre de chapelle mise à part, il faut bien reconnaître le rôle actif de la Banque de France (et d’autres de ses homologues) dans la tokenisation de la finance. Et celle-ci passera notamment par l’émission d’une CBDC. La BdF se tient prête pour 2023 avec une MNBC wholesale.

L’avenir de la finance réside aussi du côté de la DeFi, où elle participe, avec des partenaires, à des expérimentations telles que Mariana. Si le futur réside dans les crypto-actifs et la blockchain, elle se fera notamment avec les banques centrales, plus que contre elle ou contre les blockchains publiques et leur écosystème privé. A quand une réconciliation ou a minima une trêve ?

Pour cette édition 2022 des pépites Web3 françaises, Coins.fr a également choisi de distinguer les entreprises suivantes :

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Christophe Auffray
Cofondateur et rédacteur en chef adjoint - Journaliste spécialiste de la transformation numérique depuis 2005, Christophe a notamment été rédacteur en chef adjoint chez ZDNet. Il suit de près l’actualité autour des actifs numériques et la décrypte au quotidien. Contact : christophe@coins.fr